Mode « grande famille » ou « entreprise » : quelle gestion pour nos associations ?

Mode « grande famille » ou « entreprise » : quelle gestion pour nos associations ?

D’un côté, certaines entreprises de traduction adoptent des pratiques du modèle associatif (responsabilité sociale d’entreprise, gouvernance démocratique, objectifs sociaux ou communautaires, etc.) ; de l’autre, nos associations à but non lucratif se rapprochent du mode de gestion entrepreneurial (budget, fiscalité, répartition des tâches, etc.). Entreprises-associations et associations-entreprises jouent les caméléons dans un environnement complexe où tout semble fusionner, entre performance économique et utilité sociale.

Les entreprises recourent de longue date au langage cher aux associations pour laisser entendre qu’elles sont, elles aussi, de « grandes familles ». Les associations, elles, adhèrent de plus en plus à l’idée de tirer parti des pratiques de gestion d’entreprise pour préserver leur « efficacité budgétaire », fidéliser leurs « membres-clients » et promouvoir un secteur d’activité devenu « industrie de produits et de services ».

S’il est certain que ces deux personnes juridiques présentent quelques similitudes, des différences marquantes les séparent, notamment en termes d’objectifs, de statuts et de modes de fonctionnement. En tête, la collégialité et la démarche non lucrative. Le principe démocratique, à la base de toute association professionnelle, et l’engagement bénévole des membres — qui sont unis par une vraie communauté de valeurs, donnent de leur temps, fédèrent leur savoir-faire, leurs compétences et leurs contacts — sont loin de rendre les associations moins complexes. Pourtant, c’est précisément cela qui rend une association humainement riche. À la gestion, au développement et aux résultats escomptés, vient s’ajouter une force en action, porteuse de valeurs éthiques et humaines qui sous-tendent le projet associatif dans son ensemble.

Cette energeia, qui se tisse au travers du bénévolat, de la confiance, de l’entraide et, plus largement, de la coopération régionale et interinstitutionnelle, renforce des valeurs auxquelles il est spontanément facile d’adhérer. Il appartient autant à nos comités directeurs qu’à nos membres de les promouvoir par la mise en place de stratégies d’engagement, de manière à renforcer le cœur de la spécificité associative : l’esprit associatif.

Pourtant, la seule considération de la dimension humaine, constitutive de l’essence même de la figure associative — avec tout ce qu’elle peut comporter de fraternel ou d’amical — n’est pas sans risques. À l’heure des nouveaux défis de notre époque, il est vital d’actionner les principes de base de la gestion d’entreprise pour les adapter à nos valeurs et à notre mission.

S’il est vrai que la réussite de nos associations ne se mesure pas à l’aune du profit, mais plutôt en termes d’impacts positifs sur la société en général et la communauté en particulier, nos structures ont bel et bien besoin de ressources financières pour promouvoir leurs causes, de personnes compétentes et engagées, de visibilité pour mobiliser leurs soutiens et de transparence financière et opérationnelle.

Porter au plus haut l’esprit associatif par une gestion efficace adaptée, performante, durable et désintéressée est un délicat jeu d’équilibre dans lequel nous avons tous et toutes notre rôle à jouer.

Nathalie Le Coutour, ACOTIP, SFT, ANTIO

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