En cette Décennie internationale des langues autochtones, le Comité permanent Langues autochtones de la FIT a organisé le 25 novembre 2023 une table ronde pour attirer l’attention sur la disparition préoccupante des langues autochtones et l’urgence qu’il y a à les préserver, revitaliser et célébrer. Cet évènement interculturel a rassemblé des voix venues d’Afrique, de l’Arctique russe et du Canada pour évoquer les effets profonds du changement climatique sur les traditions orales, les folklores, les productions littéraires, la revitalisation des langues et la vie quotidienne. Après l’allocution d’ouverture prononcée par la présidente de la FIT, Alison Rodriguez, la parole a été donnée à Roula Salam, présidente du Comité permanent.
Le premier orateur, Wayne Jackson, du territoire du Traité no 6 des Premières nations du lac Goodfish (Alberta, Canada) est traducteur certifié, formateur, rédacteur de supports pédagogiques et directeur de l’Institut culturel nêhiyawê à Edmonton. Il a présenté d’une manière émouvante le « nipiy ê-pimâcîhikoyahk » : le lien entre l’eau, source de vie, et la langue et la culture. À partir de photos, il a évoqué des souvenirs d’enfance, mais aussi plus récents, des étendues d’eau naturelles de la communauté nêhiyawê (crie). Il a ainsi rapporté que la subsistance des peuples autochtones, dépendants des lacs pour l’eau et la nourriture, a été gravement affectée par l’industrialisation et le changement climatique d’origine humaine.
Ensuite est intervenu Sibusiso Biyela, vulgarisateur scientifique sud-africain chez ScienceLink, dont les recherches explorent le mode de vie des tribus zouloues. Dans sa présentation intitulée Appliquer les principes de la communication scientifique et de la décolonisation à la traduction des sciences du climat vers les langues africaines, il a souligné l’importance de la traduction comme outil de décolonisation pour transmettre de manière accessible des concepts scientifiques liés au changement climatique.
Issue de la communauté des Nénètses, dans l’Arctique russe, Olga Latycheva, directrice adjointe du Centre ethnoculturel du district autochtone des Nénètses, s’est exprimée, par le truchement d’une excellente interprétation en langue autochtone, sur le thème Traduction du folklore nénètse et traces du changement climatique dans les textes oraux du peuple nénètse. Par des descriptions superbement traduites, elle a montré comment le changement climatique se reflète dans la langue et les images du folklore des Nénètses. L’intervention Discours sur le changement climatique et spécificités anthropomorphiques de Ksenia Doubrovskikh, maîtresse de conférence en traduction et linguistique appliquée à l’Université fédérale du nord (arctique), abordait la langue du changement climatique sous un angle anthropocentrique et l’interaction entre langue et écologie. Enfin, Marilyn Shirt de la nation crie du lac Saddle en Alberta (Canada), doyenne du programme Langues autochtones à l’Université nuhelot’įne thaiyots’į nistameyimâkanak Blue Quills (UnBQ), est intervenue sur L’impact du changement climatique sur la revitalisation et la traduction des langues autochtones. Ce qu’elle a donné à voir de la rude réalité des stigmates de la colonisation, conjugués aux répercussions du changement climatique sur les déplacements de familles et la transformation des pratiques traditionnelles, soulignait l’importance de la traduction et de l’enseignement pour la jeune génération.
Rendez-vous sur la chaîne YouTube de la FIT pour le résumé vidéo de cet événement très réussi !
Roula Salam, Conseil de la FIT